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Electricité, ce qui se cache derrière votre facture

Finance

Avec la hausse du prix de l’énergie, les consommateurs voient leur facture d’électricité augmenter dans des proportions significatives. Si le contexte énergétique, économique et géopolitique actuel génère une tendance haussière au niveau des tarifs, d’autres facteurs sont à considérer pour comprendre cette augmentation. Faisons le point.

Si le coût de l’électricité semblait dérisoire il y a quelques années, l’augmentation des tarifs actuels fait, avec raison, réagir les consommateurs. Pourquoi notre facture d’électricité est-elle plus élevée qu’auparavant ? Quels facteurs expliquent cette hausse ? Et surtout, à quoi s’attendre durant ces prochaines années, et pourquoi ? Autant de questions auxquelles nous allons tenter de répondre dans cet article.

Déjà, pour comprendre comment s’articulent les montants répercutés dans notre facture d’électricité, il s’agit de distinguer ses trois composantes principales : l’énergie, le transport et les taxes. Si l’une de ces composantes s’avère directement impactée par les fluctuations du marché, les autres sont corrélées à des dynamiques politiques, sociales et durables distinctes. Point de situation.

1. L’énergie
Dans notre facture d’électricité, l’énergie constitue la première composante la plus évidente. Déterminée par notre consommation effective, cette tranche du prix total correspond au nombre de kWh utilisés par ménage. Concernant l’électricité, le prix du courant est déterminé en continu par de nombreux facteurs, dont les fluctuations du marché de l’énergie, notamment régi par le système du merit order. Et dans le contexte géopolitique en vigueur depuis l’invasion russe en Ukraine, marqué par une inflation importante et des épisodes de pénuries d’hydrocarbures, le prix de l’électricité grimpe. Pour faire simple, notons que le système du merit order fixe le prix de l’électricité en tenant compte du coût marginal de production de la dernière centrale sollicitée, soit actuellement celui des filières fonctionnant avec des énergies fossiles. Sur le marché, les producteurs s’alignent donc sur ces filières coûteuses, ce qui se répercute sur notre facture.

« Chez Romande Energie, notre politique d’achat d’énergie vise cependant à limiter au maximum notre dépendance à ces fluctuations pour réduire les risques », souligne Julie Blumberger, Business Line Manager. « Notre stratégie d’approvisionnement implique ainsi des achats répartis sur des périodes de quatre ans, pour lisser ces fluctuations. Concrètement, cela veut dire que nous fixons en amont des périodes durant lesquelles nous allons acheter l’énergie. Le prix de l’électricité dépend également des infrastructures de production dont on dispose. Le fait de bénéficier de ses propres moyens, comme les barrages par exemple, permet de ne plus dépendre totalement des fluctuations du marché, même si l’entretien de ces infrastructures s’avère coûteux. »

En termes d’infrastructures de production, les communes et gestionnaires de réseaux romands sont nombreux à avoir diminué leurs investissements durant ces dernières années, notamment en raison d’un prix de l’électricité resté très bas pendant une longue période. Aujourd’hui, cette tendance s’inverse. Romande Energie fait figure de profil intermédiaire en la matière, en couvrant environ 40% des besoins énergétiques de ses clients avec ses  sites de production, dont des centrales au fil de l’eau, des parcs solaires photovoltaïques et des centrales biomasses. Durant ces prochaines années, il reste très difficile de prédire si cette composante de notre facture d’électricité va aller en augmentant, en se stabilisant ou en baissant.

2. Le transport
Cela peut sembler évident, mais on a parfois tendance à oublier que l’électricité n’arrive pas si facilement dans notre prise. Avant cela, elle doit bien sûr être transportée par l’intermédiaire d’un vaste réseau, dont l’entretien et le développement s’avèrent des plus coûteux. Dans ce domaine, la deuxième composante de la facture se divise en deux parties. Au niveau national, le réseau très haute tension - les pylônes et lignes électriques qui nous raccordent au réseau européen - est géré par Swissgrid. Et au niveau régional, les zones de distribution sont assurées par les gestionnaires et distributeurs locaux, dont fait partie Romande Energie pour le canton de Vaud et une partie du Valais.

« Cette composante réseau dans la facture est donc indépendante des fluctuations du marché et du prix de l’énergie », précise Julie Blumberger. « Cependant, l’entretien et le développement du réseau coûtent très chers, en particulier dans le contexte actuel d’électrification intensive de notre société. Transports publics électriques, mobilité individuelle, bornes de recharge, pompes à chaleur : tous ces dispositifs nécessitent une importante mise à jour de notre réseau qui n’a pas été construit dans l’optique de supporter une telle demande. »

Durant ces prochaines années, cette tendance à la hausse de la composante réseau de notre facture d’électricité devrait logiquement persister. Une dynamique qui traduit aussi et surtout un engagement durable souhaité par la société. Nécessaire à la pérennisation des infrastructures existantes et au déploiement de dispositifs durables, cette augmentation doit également permettre de réaliser progressivement ce que l’on appelle le smart grid. Ce réseau intelligent dont la gestion automatisée par des processus informatiques permettrait d’optimiser le délicat équilibre à maintenir en permanence entre l’offre et la demande. Décarboner notre paradigme énergétique implique de développer massivement les énergies renouvelables. Et qui dit énergies renouvelables, dit aussi et surtout production aléatoire (en fonction des aléas météorologiques) et décentralisée. D’où la nécessité d’adapter le réseau.

3. Les taxes
Réparties au niveau fédéral, cantonal et communal, les taxes permettent d’assurer le déploiement de la Stratégie énergétique 2050 et la concrétisation sur le terrain de notre politique énergétique. Romande Energie ne touche évidemment rien sur cette composante de la facture d’électricité, en percevant et redistribuant intégralement ces montants aux acteurs concernés.

« À nouveau, cette composante est indépendante des prix de l’énergie et de leur fluctuation sur le marché », souligne Julie Blumberger. « Ces taxes sont le reflet de notre politique énergétique, dont l’engagement social a encore été mis en lumière lors des récentes votations en faveur de la loi climat. En considérant la nécessité de décarboner nos filières de production, il est normal que ces taxes augmentent ponctuellement. En janvier 2024, une nouvelle taxe fédérale entrera par ailleurs en vigueur pour pérenniser notre patrimoine hydraulique et renforcer notre indépendance énergétique. »

Pour les prévisions durant ces prochaines années, la tendance à la hausse devrait se confirmer également pour cette composante de la facture d’électricité. Une augmentation qui devrait aussi permettre de réaliser en partie des projets de grande envergure au sein des filières hydrauliques, dont des travaux de surélévation des barrages.

En conclusion : se donner les moyens de sortir de la dépendance économique et environnementale aux hydrocarbures

Plus que la tendance à la hausse de certaines composantes de notre facture d’électricité, il s’agit de considérer ces dynamiques à l’aune du défi durable que notre société doit parvenir à relever. La transition énergétique a un certain prix. En même temps, en mettant les moyens nécessaires à disposition, il devient possible de financer collectivement ce changement de paradigme tout en bénéficiant en parallèle d’avantages financiers suite aux économies d’énergie que l’on peut commencer à réaliser, que ce soit au niveau des transports, de nos habitudes de consommation ou encore de notre habitat.

Thomas Pfefferlé
Rédigé par Thomas Pfefferlé · Journaliste innovation

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