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L’Assemblée de la transition de l’UNIL

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Après une année d’intense travail, l’Assemblée de la transition de l’Université de Lausanne (UNIL) a formulé ses propositions pour ramener les activités de l’institution dans les limites écologiques de la planète toute en répondant à sa mission sociale.

En octobre 2022, c’est par tirage au sort qu’ont été choisies les 60 personnes de l’Assemblée de la transition, représentées équitablement (15 personnes par groupe) par les corps estudiantin, intermédiaire (soit le personnel scientifique - enseignants et chercheurs – ne portant pas le titre de professeur), professoral et le personnel administratif et technique. Après un processus collaboratif soutenu, l’Assemblée a remis son rapport final à la Direction de l’UNIL en septembre 2023, proposant 28 grands objectifs et 146 pistes d’actions pour réduire les impacts de l’université. La Direction de l’UNIL, en collaboration avec les responsables des facultés et services ainsi qu’avec son Advisory Board (composé d’une dizaine de personnes externes), se donne quelques mois évaluer les propositions. Au printemps 2024 (mai-juin) seront communiquées les premières actions à entreprendre, en priorisant les plus impactantes. Pour l’Assemblée de la transition c’est la fin d’un travail, pour la Direction le début d’un autre.

Un donut plus aigre que doux

Pour – entre autres – mieux appréhender visuellement la situation, le Centre de compétences en durabilité (CDD) de l’UNIL a adopté la théorie du Donut de l’économiste Kate Raworth, une approche qui définit l’espace sûr à atteindre : à l’intérieur du donut figurent les besoins essentiels qui ne sont pas encore assurés pour l’ensemble de l’humanité et à l’extérieur, les équilibres planétaires mis sous pression. « La particularité de la théorie du Donut, relève Benoît Frund, vice-recteur Transition écologique et campus à la Direction de l’UNIL, est qu’elle permet de définir des seuils au-delà desquels notre vie sur Terre est menacée. On appelle cela le plafond écologique. De plus, elle s’intéresse aux minimaux sociaux au-dessous desquels une vie sûre et digne n’est plus assurée. C’est le plancher social. Ramener les impacts de l’activité de l’UNIL entre le plafond écologique et le plancher social revient à entrer dans le Donut. »

Et en un coup d’œil, on saisit l’ampleur de la tâche : gigantesque ! Pour respecter l’Accord de Paris et atteindre ses objectifs, Julien Meillard, adjoint Transition écologique et campus, parle d’une réduction de 95% des émissions de l’université d’ici à 2050. Une transformation du campus en profondeur qui demande à l’institution honnêteté, ténacité et courage. Que cette ambitieuse démarche inspire un grand nombre d’acteurs, privés comme publics.

Moins c’est mieux

Parallèlement aux travaux de l’Assemblée s’est tenu le cycle d’événements (conférences, tables rondes, théâtres, projections, etc.) « Moins c’est mieux ». Co-organisé par le Centre de compétences en durabilité de l’UNIL et Romande Energie, il a réuni des expertes et des experts de renom pour ouvrir les discussions autour de la sobriété, comme Julia Steinberger, auteure principale du 3e groupe de travail du GIEC, Barbara Nicoloso, auteure de l’excellent « Petit traité de sobriété énergétique », Timothée Parrique, chercheur en économie écologique et auteur de l’incontournable « Ralentir ou périr. L’économie de la décroissance » ou encore Aurore Stéphant, passionnante ingénieure géologue minier, spécialisée dans les impacts sanitaires et environnementaux des filières minérales. Pour Michèle Cassani, porte-parole du groupe Romande Energie, ce cycle d’événements était une occasion unique pour le public de rencontrer des intervenantes et des intervenants de grande qualité et, pour l’entreprise, de soutenir une démarche entre en résonnance avec la philosophie à l’interne. « Notre stratégie est basée sur les trois piliers de la durabilité : environnemental, social et économique.  Être partenaire de cet événement nous a paru totalement pertinent. Il est en résonnance avec le message que nous souhaitons faire passer, soit « consommez moins, consommez mieux ». Nous soutenons les actions qui permettent de sensibiliser, de faire prendre conscience du pouvoir qu’ont les gens à intégrer la sobriété dans leur quotidien, même si notre bras de levier en tant qu’acteur de la décarbonisation reste l’efficience énergétique. »

Les grands objectifs, en résumé…

Nous vous proposons un aperçu de quelques-uns des 28 grands objectifs contenus dans le rapport de l’Assemblée de la transition. Ce n’est évidemment qu’une mise en bouche. Pour le plat de résistance, cliquez ici.

Énergie et Bâtiments :

  • adopter un moratoire sur la construction de nouveaux bâtiments (et mieux utiliser les surfaces déjà existantes),
  • optimiser et rénover 100% de l’enveloppe de tous les bâtiments d’ici 2030,
  • doter l’UNIL d’une charte de durabilité obligatoire (appel d’offres) concernant la construction et la rénovation des bâtiments


Mobilité :

  • amener la population de l’UNIL à venir à vélo (y compris électrique) à hauteur de 20% de part modale des trajets pendulaires d’ici 2030,
  • réduire les kilomètres parcourus en avion pour les déplacements professionnels de 50% d‘ici 2030.


Alimentation :

  • réduire de 27% à 5% le poids total des aliments d’origine animale proposés à l’UNIL d’ici la rentrée 2028.


Électronique et numérique :

  • réduire la consommation énergétique liée au numérique (proportionnellement au nombre de membres de l’UNIL) de 40% d’ici 2030.
  • réduire l’achat de matériel électronique neuf de 40% d’ici 2030.


Autres :

  • inventorier 95% du matériel de l’UNIL et mutualiser tout ce qui peut être partagé (mobilier, équipement, consommables, matériel de recherche), d’ici 2025,
  • investir la fortune de l’UNIL directement dans la transition écologique,
  • former le 100% de la communauté UNIL à la durabilité, d’ici 2025.


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« Nous devons jouer notre rôle d’université et expérimenter des solutions »

Interview de Julien Meillard, adjoint du vice-recteur Transition écologique et campus à la Direction de l’UNIL.

Julien Meillard

Revenons au début de l’aventure : qu’est-ce qui a motivé la création de cette Assemblée de la transition et pourquoi avoir opté pour le tirage au sort pour élire ses membres ?

Nous élaborons actuellement la stratégie de transition écologique et sociale de l’université (Plan d’intentions de la Direction de l’Université de Lausanne). L’Assemblée de la transition est un des outils mis en place pour nous aider dans cette démarche. Le but est de dégager une stratégie ambitieuse portée par la Direction et suivie par la communauté universitaire. Nous avons alors choisi le tirage au sort pour impliquer les participantes et les participants d’une manière un peu différente de ce qui a été fait jusqu’ici et susciter l’engagement. Et ça a bien marché. Les 60 membres, malgré des points de vue initiaux relativement divergents, ont réussi à converger vers des objectifs ambitieux.

Y a-t-il un aspect qui vous a particulièrement surpris durant cette année de travail avec l’Assemblée ?

Nous avons décidé de mesurer le niveau d’adhésion, non pas de manière binaire « oui/non », mais en indiquant à quel point le participant était en accord avec la proposition. J’ai trouvé particulièrement intéressant de constater que les mesures très ambitieuses remportaient un taux d’adhésion quasiment unanime, montrant que les membres de la communauté universitaire sont prêts à aller vers des actions qui changeraient fortement le fonctionnement actuel.

Vous mentionnez une réduction des émissions de 95% d’ici 2050, un chiffre colossal. Comment abordez-vous ce défi au sein de la Direction de l’UNIL ?

Nous n’avons pas la prétention d’affirmer que nous y arriverons, mais nous avons fait le choix d’assumer cette réalité et d’être transparents dans notre démarche et nos résultats. Si nous voulons être cohérents avec ce que nous disent nos scientifiques, alors ça donne ce donut, qui montre des dépassements très conséquents de plusieurs limites planétaires. Nous devons jouer notre rôle d’université et expérimenter des solutions. Il est par contre très clair que les 5 à 10 années à venir seront déterminantes pour se mettre – ou non – sur la bonne trajectoire. L’Assemblée a fourni un gros travail et nous donne une vision des manières possibles de réduire les postes les plus impactants.

Pouvez-vous nous donner un exemple concret de mesure prise dans ce sens ?

Nous avons constaté que plus de 20% des émissions de CO2 de l’université provenaient des déplacements professionnels en avion. Ainsi, l’Assemblée de la transition propose de réduire, d’ici 2030 – et par rapport à 2019 –, de moitié les kilomètres parcourus en avions. Nous avons fait un premier pas dans ce sens en ne remboursant plus les billets d’avion pour des destinations atteignables en 10 heures de train ou moins. En contrepartie, nous payons un trajet en 1re classe dès 4 heures de train, voire une nuit d’hôtel supplémentaire sur place. Il faut voir ce changement comme une incitation à voyager moins souvent, mais pour une plus longue durée afin de combiner plusieurs activités (conférence, visite de collègues, …).

La classe politique a un rôle essentiel à jouer pour favoriser la transition vers des modes de vie plus soutenables. Avec votre formation en science politique, quel regard portez-vous sur la situation ?

Elle devrait s’inspirer de nos initiatives (rires). Plus sérieusement, j’ai senti un intérêt pour notre démarche, notamment lors d’une rencontre avec la Commission de gestion du Grand conseil lors de laquelle nous avons pu échanger sur le fonctionnement de l’Assemblée. Les personnes présentes semblaient particulièrement intéressées par le tirage au sort des membres et nous ont demandé des retours d’expérience. On sent un intérêt du politique sur ces nouveaux dispositifs délibératifs et démocratiques, qui réalise que ce n’est plus tenable de prendre des décisions dans son bureau et d’espérer que la population adhère sans sourciller. Il faut inventer d’autres approches. Et les assemblées tirées au sort ne devraient pas être perçues comme une concurrence illégitime, mais plutôt comme un moyen d'activer l'intelligence collective et de faire remonter les préoccupations, fournissant des informations utiles à celles et ceux qui doivent prendre des décisions.

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Sources et références :


Interview Benoît Frund, vice-recteur Transition écologique et campus – Journal « Uniscope » : https://wp.unil.ch/uniscope/la-hauteur-de-la-marche-est-tres-importante/

Crédit photo : Fabrice Ducrest ©UNIL

Joëlle Loretan
Rédigé par Joëlle Loretan · Rédactrice

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