En Suisse, près de 45% de la consommation énergétique et un tiers des émissions totales de CO2 sont attribuables aux quelque 2,3 millions de bâtiments. La part importante de consommation énergétique du secteur du logement s’explique essentiellement par un recours encore important aux combustibles fossiles pour le chauffage : du mazout surtout (52%), et du gaz naturel (21%). Par ailleurs, la situation géographique de nos logements détermine également notre recours à la mobilité : le fait d’être fervent utilisateur des transports publics ou adepte de la mobilité douce ne dépend pas uniquement de notre bonne volonté, mais également du temps de trajet pour se rendre sur notre lieu de travail ainsi que de l’offre en transports existante. C’est pourquoi les thématiques de la consommation énergétique des bâtiments, de la mobilité, mais aussi de l’intégration sociale ou la consommation, doivent également être traitées à l’échelle du quartier. C’est le cas dans les quartiers dit « durables ».
Les quartiers durables - L'habitat du futur
Le quartier : l’échelle idéale pour un lieu de vie de qualité
Pour lutter contre les problèmes environnementaux actuels, on parle souvent de densification des villes et des zones urbaines. Mais densifier ne signifie pas uniquement regrouper les habitants dans les mêmes lieux de vie : cela signifie également leur offrir des lieux de qualité. Les quartiers durables permettent de répondre à cet enjeu : ils ont pour objectif d’être des lieux de vie agréables pour leurs habitants, intégrant de manière équilibrée les dimensions économique, environnementale et sociale. De plus en plus de villes et communes développent ce genre de quartier, qui se révèle être l’échelle idéale pour en influencer l’aménagement.
Une approche globale pour un quartier durable
Pour rendre un quartier durable, il faut prendre en compte de nombreux aspects : architecture, aménagement du territoire, écologie des bâtiments, mobilité, politique sociale et culturelle, etc. La démarche One Planet Living, mise au point par le WWF, donne un cadre à cela. Cette démarche est fondée sur un constat : les humains utilisent davantage de ressources que ce que la Terre est capable de nous offrir pour vivre durablement. Cette méthode vise donc à construire des quartiers permettant de freiner la surconsommation et de réduire l’impact de nos modes de vie sur l’environnement.
La démarche One Planet Living s’appuie sur les objectifs du développement durable des Nations Unies ainsi que sur les objectifs de la Société à 2000 Watts. Elle comprend dix principes fondamentaux, qui permettent de mieux comprendre le concept de ces quartiers durables :
- Zéro carbone : limiter la consommation énergétique des quartiers (par exemple avec les immeubles passifs, extrêmement bien isolés et ne nécessitant donc pas de système de chauffage actif, ou avec des sources d’énergie renouvelables).
- Zéro déchet : appliquer la démarche « réduire, réutiliser, recycler » à toutes les phases du projet afin de limiter la production de déchets des quartiers, et le cas échéant de les réutiliser et revaloriser à travers d’autres usages. Le recyclage se fait en dernier recours.
- Transport durable : rendre accessible les transports en commun ainsi que les services/commerces de proximité pour notamment limiter la distance parcourue et développer des offres de transports combinées et mutualisées.
- Matériaux locaux et durables : utiliser des matériaux locaux et durables, maîtriser l’impact de leur fabrication et optimiser leur transport.
- Alimentation locale et durable : encourager les habitants et les commerçants par des actions de sensibilisation.
- Gestion durable de l’eau : limiter les usages abusifs de l’eau et réutiliser les eaux grises (pour les WC ou l’arrosage par exemple). Instaurer une gestion à ciel ouvert de l’eau de pluie, avec des zones humides et inondables dans l’espace public.
- Habitats naturels et diversité : créer des habitats naturels de qualité reliés entre eux et rendre davantage de surfaces perméables.
- Culture et patrimoine : planifier les quartiers en prenant en compte leur identité, leur histoire, et les activités culturelles, tout en intégrant les habitants et usagers par des processus décisionnels.
- Équité et partenariats locaux : encourager l’économie de proximité et la mixité sociale, commerciale et confessionnelle.
- Qualité de vie et bien-être : proposer des conditions de confort optimale (modularité des appartements, choix des matériaux, ensoleillement, vue vers l’extérieur, espaces publics à proximité) pour offrir une accessibilité pour tous.
Grâce à ces principes, les quartiers durables se veulent plus responsables et agréables à vivre, en phase avec notre époque et nos préoccupations pour les générations futures. Mais attention, même si des critères existent pour définir la durabilité d’un quartier, celle-ci ne se décrète pas, ni ne s’impose. Elle est davantage l’aboutissement du développement des divers principes présentés ci-dessus.
Des quartiers durables toujours plus nombreux en Suisse romande
À Meyrin, l’écoquartier des Vergers a vu le jour en 2019. D’ici à la fin de l’année, ce seront près de 3'000 personnes qui habiteront dans les quelque 30 bâtiments du quartier.
Plus qu’un quartier, les Vergers fonctionnent comme un grand village et sont vus comme un laboratoire - un lieu d’expérience et de projets innovants. En effet, une ferme urbaine, un poulailler collectif, un espace de garde pour les enfants, ou encore un espace de méditation y ont vu le jour. Le quartier suggère une autre façon de vivre, plus inclusive, plus saine, et plus sereine.
Des projets d’envergure sont en cours de développement dans de nombreuses villes suisses. C’est par exemple le cas à Lausanne où le projet Métamorphose comprend la construction de deux écoquartiers : les Plaines-du-Loup et les Prés-de-Vidy. Le premier accueillera près de 11'000 habitants, et le second 2'500. Plus que de simples quartiers, ceux-ci sont définis comme étant des « morceaux de ville » par la Ville de Lausanne.
Transformer les quartiers existants
Mais la durabilité ne concerne pas uniquement les nouvelles constructions. Aujourd’hui, c’est aussi et surtout sur le bâti existant que nous devons agir. Pour parvenir à une transition énergétique rapide et efficace, le potentiel d’amélioration de chaque quartier doit être exploité, sans exception. Les quartiers anciens regorgent souvent de potentiel : ils sont denses et donc favorables à la performance énergétique, leur mixité et leur taille permettent l’usage de la mobilité douce et favorisent les échanges sociaux. Autant de prérequis au développement d’une vie de quartier durable. Ils doivent donc être des moteurs pour les projets urbains du futur.
Un nouveau modèle de mieux vivre ?
Comment habiter demain ? En plus de limiter la consommation énergétique et de lutter contre les changements climatiques, les quartiers durables nous permettront peut-être de retrouver une « vie de village », ou plutôt de quartier nous permettant de vivre davantage en harmonie avec nos voisins. Au vu des problèmes environnementaux auxquels nous faisons face, il est souhaitable de créer davantage de liens à l’échelle locale et de s’ancrer au niveau du quartier, plutôt que de multiplier les liens longue distance.
Et si les quartiers durables représentaient une opportunité de revenir à un rythme de vie plus calme et plus durable, tant pour la planète que pour ceux qui la peuplent ?
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