De nombreux architectes, entrepreneurs et propriétaires s’impliquent pour concrétiser des projets immobiliers durables. Nous vous proposons un petit tour d’horizon en Suisse pour partir à la découverte de logements qui se distinguent du point de vue écologique.
Tour de Suisse des maisons écologiques (partie 2)
Bâtir son logement, quel beau projet. Et quel projet encore plus beau si l’on parvient à combiner la construction de son nid avec les impératifs durables qui s’imposent à notre époque. En Suisse, plusieurs maisons se distinguent par l’emploi de matériaux écologiques, l’élaboration de systèmes d’isolation novateurs ou encore l’utilisation d’énergies renouvelables locales pour tendre vers l’autonomie. Tout au long de cette série, on vous emmène pour un petit tour de Suisse afin de vous faire découvrir des maisons inspirantes et leurs concepteurs, voire leurs habitants.
Châtillon (FR)
C’est une maison qui reflète le calme et la paix de la nature environnante. Construite sur les hauteurs du lac de Neuchâtel, à Châtillon, cette villa représente surtout un engagement concret puisqu’elle n’est autre que celle de l’ingénieur spécialisé en énergies renouvelables Marc Muller. Une maison qui incarne donc les réflexions engagées et les prises de position fortes de l’ingénieur en matière de transition ou de décroissance. Le message est d’autant plus fort que la villa tient une promesse de départ loin d’être anodine : démontrer la possibilité d’habiter dignement tout en étant complètement autonome. De fait, le logement n’est pas raccordé au réseau électrique ni au réseau d’eau. Un projet de taille, qui démarre en 2015.
S’il est ingénieur, Marc Muller est aussi autodidacte quand il s’agit de concrétiser les plans et calculs de son projet d’habitat. « J’ai en effet pris part à toute la construction de ma maison, en faisant autant des travaux de maçonnerie que d’installation sanitaire mais aussi de menuiserie. Dès le départ, ma démarche a consisté à utiliser les atouts naturels de l’environnement dans lequel allait se trouver ma maison. »
Architecture organique
Une vision architecturale durable qui contraste avec les approches technologiques développées globalement. Exemple : profiter des dispositions naturelles du terrain en utilisant la végétation tel un store. Durant la chaude saison, le feuillage fourni qui entoure l’ouvrage permet de filtrer le rayonnement solaire. Et en hiver, à l’inverse, la végétation dénudée optimise le passage des rayons sur les baies vitrées du logement, contribuant ainsi à le chauffer. Pour optimiser l’efficience de ce chauffage naturel et limiter au maximum les déperditions de chaleur, une isolation de 60 centimètres d’épaisseur de paille a été installée. Les fenêtres sont par ailleurs constituées d’un triple vitrage. À l’intérieur, un poêle à bois vient compléter le système, en participant au chauffage de l’eau sanitaire durant les mois les plus froids de l’année.
La toiture compte en outre des panneaux photovoltaïques assurant une puissance de 12 kW. Le courant alimente les appareils ménagers et contribue aussi au chauffage de l’eau sanitaire. Enfin, un système de batteries est également présent, permettant à la famille de recharger ses véhicules et vélos électriques. Le surplus restant est récupéré dans des batteries au lithium de récupération (2ème vie).
Simplicité, circularité et autonomie
Construite sur une ossature en bois issu des forêts des préalpes fribourgeoises, la maison comporte des murs d’une composition plutôt unique. En effet, ils sont en partie composés de la terre issue des travaux d’excavation entrepris sur le terrain pour construire une piscine naturelle. Et oui, pour Marc Muller l’idée de base a toujours consisté à ne faire aucun compromis sur le confort.
Pour les murs, notons encore qu’à la terre d’excavation sur site ont été ajoutés du sable et de la paille. Une composition naturelle et durable enveloppe ainsi la maison, conçue sans murs porteurs intérieurs. Une configuration pensée dans l’optique de laisser une grande liberté à la famille - et aux futurs habitants dans le siècle à venir - dans l’agencement du lieu et son évolution dans le temps.
Autre astuce architecturale des plus ingénieuses, récupérer une ressource naturelle si précieuse : l’eau de pluie. « J’ai imaginé un système de collecte et de stockage intégré sur le toit. Muni d’un filtre, il offre la possibilité de fournir l’ensemble de l’eau potable qui coule dans nos robinets. » Au total, le dispositif permet de stocker 6000 litres d’eau de pluie.
Une configuration dont l’ingéniosité et la simplicité se traduisent par des performances des plus significatives, tant sur le plan économique qu’en termes de confort. La maison autarcique de Marc Muller fournit en effet par elle-même l’énergie nécessaire au chauffage, à la mobilité et à l’approvisionnement en eau potable de la famille, sans oublier l’arrosage du jardin au sein duquel un potager est soigneusement entretenu. Côté finances, le projet constitue également une réussite exemplaire puisque les charges mensuelles ne dépassent pas 50 francs, montant qui sert à acheter le bois de chauffage uniquement.
Le concepteur
Pour Marc Muller, le déclic durable et environnemental se produit en 2002, lors d’un séjour personnel au sein d’une ferme au Canada. « C’est à ce moment que j’ai pris conscience de mon attachement à la nature, tout en réalisant qu’il était parfaitement possible de conjuguer confort, ou qualité de vie, et développement durable. »
Suite à ce séjour, il se lance dans les énergies renouvelables. Objectif : contribuer à mettre en œuvre la transition écologique et énergétique au sein des collectivités, des entreprises et de diverses organisations. Ingénieur, il s’intéresse avant tout aux facteurs psychologiques et décisionnels qui peuvent intervenir dans une perspective de changement et d’adaptation. Une vision affinée lors d’un périple entrepris en 2009 durant lequel il réalise un tour du monde de deux années à bord d’une voiture électrique-solaire construite pour l’occasion par des écoles d’ingénieurs. Il traverse alors quatre continents à la seule force de l’énergie solaire afin d’aller à la rencontre des acteurs de la transition écologique aux quatre coins du globe. Son créneau principal : revenir massivement aux métiers et savoir-faire pratiques.
« La réussite de la transition énergétique dépend en grande partie de notre capacité à former très rapidement un grand nombre de professionnels dans les métiers de la construction, de l’agriculture et de l’énergie. Il nous faut parvenir à opérer un virage décisif vers des savoir-faire concrets et pratiques pour mette en œuvre la transition. »
Découvrez la maison en vidéo !
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